Le passage sous pompe me libère du pied à perf. Désormais,
pour aller aux toilettes, je traîne un gant accroché à la ceinture par une
épingle à nourrice et non un truc bancal à quatre roues qui ne parviennent pas
à se décider dans quel sens elles vont aller. C’est pourtant simple de savoir
qui est le boss, bordel !
Le ballet médical continue. Infirmières toutes les deux
heures pour la glycémie, médecin le matin, voire l’après midi, juste pour
confirmer que les taux d’insuline balancés fonctionnent. Curieux, j’ai voulu
savoir comment ces taux étaient élaborés. Ils ne sont pas rentrés à fond dans
le sujet mais ils prennent en compte le poids de la personne, ce qu’elle mange,
ses activités physiques et les réactions de l’organisme, tout un tas de données
en fonctions des différents examens que j’ai subi depuis mon entrée. Connaître
quelqu’un à ce point en deux jours alors que nous-mêmes, nous n’y parvenons pas
en toute une vie, ça tient du prodige.
Un facteur de l’équation est cependant écarté immédiatement :
les aliments. Repas calibré spécial diabétique. Des légumes (150 à 200 gr,
voire moins, cela dépend), des féculents (150 gr), un laitage (yaourt ou une
portion de fromage de 40 gr), un morceau de pain, un fruit, une viande ou un
poisson à midi, une soupe le soir.
Tout cela est bien joli et rempli bien l’estomac seulement,
en ce qui me concerne, je mange moins chez moi. Il m’arrive de faire des repas
sans pain, sans fromage et d’alterner féculents et légumes verts. Enfin bon, on
verra bien lorsque je rentrerai…
La pompe, c’est pas mal pour renvoyer le pied à perf dans le
placard. Mais point de vue tranquillité, j’ai connu mieux. Pour dormir, par
exemple. Mon esprit peut-être quelque peu tortueux et torturé s’imagine qu’en
me tournant, je vais retirer le cathéter. Bien entendu que je ne pense pas au
geyser de sang qui va en découler et la transformation de la chambre en film d’horreur,
voire gore, ultra-réaliste ! C’est juste qu’on ne sens rien quand on le
retire et que si l’insuline ne passe plus, on n’en ressent pas plus les effets.
Surtout que je ne sais pas encore quels sont les effets d’une
hypo et d’une hyperglycémie. Comme nous approchons du week end, je ne verrai le
médecin que le lundi, voir le mardi.
D’ailleurs, au premier changement de cathé, le petit boîtier
ne met pas longtemps à sonner. Ça arrive que ça se bouche ou que ça se torde.
Tu parles d’un pratique !
Alors le soir, on me retire tout ça. L’infirmière vient me
présenter l’autre option, celle qui va m’accompagner dans un premier temps :
la piqure. La première injection est faite par des mains expertes avec une
seringue, à l’ancienne mais dès le lendemain matin, j’apprendrai à manier les
stylos.
Il existe deux sortes d'insuline, dite lente et rapide. La rapide se prend avant un repas. Son action est... rapide. Dans les dix minutes qui suivent l'injection. Elle dure 2h30 voire 3h, ça dépend des organismes et elle peut durer un peu plus longtemps.
La lente se fait à heure fixe. Pour moi, c'est à 19h. En fonction des besoin, elle agit 12 ou 24h. Au départ, je suis sur une Lantus de 24h.
On passe sous silence la manière de calculer un rattrapage
en fonction de la glycémie. On se concentre sur le protocole d’injection, en respectant
les doses que l’on me prescrit. Le reste viendra très vite.
Tu prends ton coton imbibé d’alcool, tu passes le bout du
stylo dessus, tu retires le papier sur le capuchon de l’aiguille, tu visses l’ensemble
sur le stylo, tu dévisses le capuchon, tu tournes la molette de huit crans. C’est
la purge. Huit crans, donc huit unités, pour un stylo neuf et deux par la suite.
Tu balances tout ça où tu peux, où tu veux, par terre, contre le mur, dans l’œil
de ton voisin, peu importe. Tu te reportes aux doses que l’on t’a prescrites.
En ce qui me concerne, 10 unités au petit-déjeuner et 8 le midi et le soir.
Je me balance donc 10 unités dans le bras, dans la zone
déterminée, jamais ailleurs, afin que l’insuline se propage correctement.
Le soir à 19h, même combat. Sauf qu’il faut rajouter une
injection d’insuline à action lente, l’insuline pour vivre. Celle que j’ai a
une action de 24h. Et il est important que je fasse cette injection à heure
fixe car si je décale, je risque un surdosage et donc des hypoglycémies dont je
ne connais toujours pas les effets.
Ce qu’on appelle la Lantus, 21 unités, s’injecte dans la
cuisse ou l’abdomen, à différents endroits à chaque fois pour éviter la lipohypertrophie.
C’est l’accumulation d’insuline qui crée une sorte de boule de graisse. Cela à surtout
pour effet de retarder la diffusion de l’insuline et de retarder son effet
sur les glycémies. Il ne faut donc pas masser la zone bosselée car on risque de
provoquer des hypoglycémies en favorisant l’absorption d’une grande quantité d’insuline
en un temps réduit.
Les zones d'injection d'insuline. En rose pour l'insuline rapide, en bleu, orange et vert pour l'insuline lente. |
Quoi qu’il en soit, l’insuline en stylo me laisse plus
tranquille que la pompe.
Me reste à lever certaines zones d’ombre comme les unités à
injecter en plus… Tout vient à point à qui sait attendre.